Territoire d’eaux

Le réseau hydrographique du Jura est organisé en deux systèmes totalement différents, celui de la Plaine où les cours d’eau s’écoulent d’est en ouest en direction de la Saône et celui de la Montagne où ils s’écoulent du nord au sud en direction du Rhône.


Territoire d'eaux
Territoire d'eaux | © Caudex

« C’est le Jura qui en fait l’ossature [de la Franche-Comté], le Rhône et la Saône qui en boivent les eaux « divinement » pures tant qu’elles restent dans la pierre jurassique. » (Touring Club de France, 1900-1906 « Sites et Monuments, Doubs-Jura-Haute Saône »).

Le Réseau karstique

Le Lapiaz de Loulle
Le Lapiaz de Loulle | © Jura-tourism.com


Entre les deux, le premier Plateau est constitué de roches calcaires perméables très fissurées : « le karst ». Chargées principalement en acide carbonique, les eaux de pluie provoquent une dissolution de la roche, qui produit des entailles et des phénomènes d’effondrement caractéristiques des réseaux karstiques : dolines, lapiaz, vallons aveugles… Ces eaux s’infiltrent et circulent ensuite dans les cavités profondes des grottes, comme à Baume-les-Messieurs, pour réapparaître au pied du plateau, au fond des reculées.


Le réseau de la plaine

La vallée du Doubs en amont de Dole
La vallée du Doubs en amont de Dole | © K.Samborska


Deux rivières principales structurent le nord du réseau, l’Ognon ne constituant que la limite nord du Jura avec la Haute-Saône :
- Le Doubs, doublé du canal du Rhône au Rhin
- La Loue qui draine le Val d’Amour et se jette dans le Doubs au sud de Dole à l’entrée de la vaste Plaine alluviale du Finage.
Ces deux rivières, après un régime torrentueux dans le Haut-Doubs, s’écoulent lentement en formant de nombreux méandres. Lors de la période des pluies abondantes et à la fonte des neiges, les crues sont très fréquentes en aval de leur confluent.

La rivière de la Brenne à Villey
La rivière de la Brenne à Villey | © Caudex - Fabriques


Le Doubs et la Loue présentent de nombreux lits secondaires et bras morts appelés mortes dont la lente fermeture et la recolonisation par la végétation constituent des milieux originaux et fragiles. Ces anciens bras dessinent des courbes autour des lits actuels des rivières qui sont particulièrement visibles en vue aérienne.
Plus au sud, le réseau est constitué de rivières secondaires au chevelu hydrographique très dense : la Cuisance, l’Orain, la Brenne, la Seille, la Vallière et la Furieuse. Ces cours d’eau, retenus dans le karst du premier plateau, apparaissent à la surface au fond des nombreuses reculées sous forme de cascades et résurgences impressionnantes dont la Roche tufeuse leur confère des silhouettes de piscines naturelles.

Etang de la Bresse Comtoise
Etang de la Bresse Comtoise | © Caudex - Fabriques


Les rivières drainent ensuite la Bresse d’est en ouest vers le Doubs et la Saône. Les quatre vallées séparent les ensembles confinés et forestiers de la Bresse Comtoise par des ruptures franches aux paysages ouverts et cultivés.
Entre les rivières de la Seille et de l’Orain, la nature du sous-sol et la topographie particulière de cette partie de la Bresse empêchent l’écoulement des eaux de surface qui sont piégées par des retenues que constituent les routes et les chemins et stagnent en une multitude d’étangs poissonneux exploités par une agriculture de survivance.



Le réseau de la montagne

Les lacs glaciaires du Jura ponctuent le Second Plateau
Les lacs glaciaires du Jura ponctuent le Second Plateau | © Caudex - Fabriques


Beaucoup moins dense que celui de la Plaine, il est structuré principalement par :

  • l’Ain qui sépare le Premier et le Second Plateau. La rivière prend sa source à 750 m d’altitude sur le plateau de Nozeroy. Elle disparaît dans une profonde crevasse appelée « Pertes de l’Ain » puis descend vers le plateau de Champagnole avec une dénivellation de plus de 100 m qui provoque des chutes et des rapides. Avant de rejoindre Champagnole, elle reçoit la Lemme et la Saine qui forment de belles cascades comme celle de la Billaude. Elle se heurte à la côte de l’Heute, pique vers le sud et s’écoule dans la Combe d’Ain, vaste dépression au paysage très ouvert. Elle reçoit sur sa rive gauche de petits affluents comme le Hérisson. Plus au sud, elle emprunte une vallée très encaissée que la construction hydro-électrique de Vouglans a transformé en un lac sinueux aux rives boisées très raides. Ce plan d’eau pittoresque, troisième retenue artificielle de France par sa capacité (600 millions de m3 d’eau et 1600 ha) est un atout pour le développement touristique lié aux loisirs nautiques.
  • la Bienne dans le Haut-Jura. Elle prend sa source près de la Cure (frontière Suisse) et s’écoule vers le nord. A Morez, elle bifurque en direction de St-Claude dans une gorge très encaissée et pittoresque qui offre de nombreux belvédères. A Saint-Claude, elle reçoit le Tacon puis s’infléchit vers l’ouest à travers des chaînons montagneux pour prendre un cours plus paresseux.
  • le Suran et la Valouse en Petite Montagne qui drainent les deux principales combes de l’unité paysagère en suivant son relief plissé du nord au sud.


Le Saut de la Forge, Cascades du Hérisson
Le Saut de la Forge, Cascades du Hérisson | © Caudex - Fabriques


Le relief de la montagne du Jura est propice à la présence de plusieurs chutes d’eau qui franchissent et soulignent les seuils de calcaires durs hérités de l’histoire géologique. Les cascades du Hérisson sont sans doute les plus connues d’entre elles. Elles dévalent la pente en une multitude de cascades spectaculaires. Elle comprend sept cascades dont l’Eventail et le Grand Saut (respectivement à 65 et 60 m de chute). Non loin du site du Hérisson, le Second Plateau est ponctué d’une succession de lacs qui se sont formés à la fin de la dernière glaciation. Leur localisation et orientation sont issues des empreintes glaciaires du Quartenaire. De nombreux belvédères offrent des vues panoramiques sur la plupart d’entre eux et leur paysage environnant.


Zone humide aux alentours de Saint-Laurent-en-Grandvaux
Zone humide aux alentours de Saint-Laurent-en-Grandvaux | © Caudex - Fabriques


La chaîne jurassienne recèle aussi l’une des plus grandes concentrations françaises de tourbières dues à la colonisation progressive de lacs morainiques rendus étanches par une abondante végétation aquatique. Gorgées d’eau, généralement proches des lacs et de ruisseaux, ces zones humides constituent des écosystèmes remarquables par leur diversité et leur richesse faunistique et floristique et les paysages qu’elles génèrent.


L’eau dans la construction et la renommée des paysages du Jura

Le lac de Vouglans et le pont de la Pyle. Un lac artificiel producteur d'énergie devenu un site majeur pour les loisirs aquatiques.
Le lac de Vouglans et le pont de la Pyle. Un lac artificiel producteur d'énergie devenu un site majeur pour les loisirs aquatiques. | © Caudex - Fabriques


L’eau a joué un rôle essentiel dans la construction des paysages industriels et touristiques, et des installations humaines sur le territoire au fil des siècles.
Dès l’époque du néolithique, les lacs de Chalain et Clairvaux étaient bordés de villages palafittes datant de -5500 à -2500. Ces sites sont inscrits au patrimoine de l’UNESCO depuis 2011.

Plus récemment, à partir du XXVIIIe siècle, c’est la force hydraulique qui a induit l’organisation du territoire autour de diverses activités industrielles. On dénombre ainsi un patrimoine lié aux forges, moulins, scieries et autres infrastructures qui nécessitaient la force motrice de l’eau pour fonctionner. La ressource était exploitée de cette manière dans la plaine avec le Doubs, et sur la montagne avec l’Ain et la Bienne. L’usage de l’eau pour servir les activités industrielles et pour la production d’énergie explique l’installation des grands bassins de vie autour de celles-ci.
Chaque petite chute d’eau était exploitée pour servir diverses productions. Ainsi, les cascades du Hérisson étaient utilisées à l’époque pour différents besoins économiques et vivriers : moulins et forges étaient construits autour de chacune d’entre elles.

Puis, de force productive, l’eau est devenue une curiosité touristique et un espace de loisirs multiples : si nous reprenons l’exemple des cascades du Hérisson, ce site classé, n’est plus affecté à aucune activité productive. Uniquement touristique, il est l’un des sites les plus visités du département pour la découverte des différentes chutes d’eaux qui ponctuent un parcours de 3,5 km.

Aujourd’hui l’image du Jura comme destination de loisirs et de découverte autour du patrimoine aquatique est une étiquette qui lui colle à la peau. En période estivale, le réseau des lacs est la destination principale des vacanciers. Ils attirent par leur aspect naturel contenu dans une végétation abondante. De nombreuses randonnées, routes thématiques et belvédères les ponctuent et ont contribué à créer des images de références pour la destination touristique. Cet attrait a également induit une dynamique de développement d’infrastructures touristiques autour de ceux-ci ainsi qu’une concentration des campings et autres lits touristiques.

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